lundi 4 juin 2012

Le Trophée MAP !


Ca y est, la pression est retombée, me voilà de retour à la rochelle pour quelques jours. Je vais donc en profiter pour revenir plus en détails sur ce le Trophée Marie-Agnès Péron. Pour ceux qui ne le savent pas, cette course porte le nom d’une navigatrice disparue lors de la Mini Transat de 1991 dont le départ fut donné de Douarnenez. Peu de temps après le départ, elle fut contrainte de revenir à Douarnenez pour des raisons techniques, elle reparti quelques heures plus tard, mais tomba au plus fort d’une dépression dans le golfe de Gascogne. Son bateau fut retrouvé sur la cote à proximité de la Corogne, vide.

Vue de la chambre...

Jeudi vers 7h30, après une très belle nuit à l’hôtel Ty Mad - merci encore Arnaud  - je suis allé plonger sous le bateau pour passer un coup d’éponge sur la carène et les appendices et m'assurer que ce soit propre, bien que ça puisse vous sembler maniaque après seulement trois jours dans le port ! S’en est suivi un briefing à 8h30 dans les règles avec un dernier point météo, les dernières recommandations de sécurité et la confirmation du parcours. En sortant du port vers 10h30, je réalise que l’an prochain c’est du même endroit que je partirai pour la Transat !

Parcours de la MAP

Le départ est donné à midi pile dans un vent faible de secteur ouest. Vu les conditions il était clair que deux groupes allaient se dessiner, l’un au sud sous les falaises en espérant un peu de vent thermique et l’autre au nord au milieu de la baie. Ne sentant ni l’une ni l’autre de ses options, je décide de tenter ma chance au milieu du plan d’eau et de partir au milieu de ligne tranquillement, bien que la ligne soit favorable dans sa partie sud.



Je prends un excellent départ qui me permet de me placer où je veux et d’avoir du vent frais et peu de temps après je suis en tête de la course ! Mais les leaders des deux autres options ne doivent pas être très loin. A la moitié de la baie de Douarnenez le leader des nordistes finit par prendre le dessus, il engrange même une belle avance grâce à une rotation du vent, je suis donc second, ce qui me va à merveille !
Puis les leaders de l’autre option viennent se recaler derrière moi, le vent tourne encore légèrement et ils envoient en majorité leur gennaker, une grande voile d’avant. Ils se rapprochent dangereusement et j’hésite à en faire autant. Mais sans pilote automatique, la manœuvre s’annonce difficile… Après tout je suis là pour apprendre, je tente donc le coup ! Ce sera malheureusement un échec cuisant, à un moment où je lâche la barre pour aller accrocher la voile devant, le bateau change de direction et je me retrouve à contre sens les voiles à l’envers avec un gennaker à moitié envoyé… c’est la galère !

Une fois retourné dans le bon sens, je retente le coup et finis par y arriver, mais je me rends rapidement compte que cette voile d’occasion acquise à moindre coût n’est pas du tout aussi performante que les autres et elle ne me permet pas d’aller vite en direction de la sortie de la baie, je l’affale donc rapidement. Le bilan est raide, je suis à peu près sixième. Le vent revient finalement dans la même direction qu’avant et les autres rangent également leur gennaker. La bataille à armes égales reprend, je ne me fais plus distancer et je double même un concurrent à l’approche du raz de Sein.

Nous arrivons donc dans cet endroit mythique de la Bretagne où le vent et le courant mènent une petite guerre ancestrale qui génère une mer très hachée assez impressionnante quelles que soient les conditions de vent. Le bateau tape, ça mouille un peu mais ça passe sans problème. Le grand spi est envoyé rapidement et commence une longue glissade dans une petite dizaine de nœuds de vent (15-20 km/h). Je ne me débrouille pas trop mal et double rapidement deux concurrents. Là je peux vous dire que je suis réellement heureux, malgré ma grosse bourde au moment du changement de voile précédent, je me sens à l’aise sur le bateau, notre vitesse est bonne et j’emmagasine du plaisir à l’état brut. Oui, tout le mal que nous nous sommes donné pendant ces dernières années valait le coup ! Et ce n’est que le début !

Après une bonne heure sous spi, le vent se renforce légèrement et deux bateaux reviennent rapidement sur moi. Je ne trouve pas le moyen d’accélérer comme eux, ils me doublent et je réalise plus tard que c’est peut être du à un mauvais placement du matériel à l’intérieur du bateau, j’étais resté sur la position « pas de vent !»...aïe. Après avoir tout reculé de deux mètres à l'intérieur, je ne me fais plus distancer. Bon bah va falloir être très vigilant sur ce point désormais ! En terme marin on appelle ce rangement évoluant au gré du vent le matossage. Je vous laisse imaginer la difficulté pour matosser quand on n’a pas de pilote automatique – donc quand on ne peut pas lâcher la barre - il faut être très rapide et toutes les 15 secondes sortir la tête et un bras pour remettre le bateau dans la bonne direction.

Nous arrivons ensuite devant Penmarc’h où commence alors une bataille d’empannages. Je perds à nouveau deux places, probablement à cause de mauvais choix stratégiques au niveau du placement de mes manœuvres car je n’ai pas l’impression d’avoir de déficit en vitesse, je redouble d’ailleurs un concurrent à l’approche des Glénans où nous devons passer une bouée. Elle marquera pour moi le début d’un bord mémorable…

Nous partons donc en direction du nord de l’ile de Groix, sous spi serré avec un vent forcissant légèrement, la quille est angulée au maximum, le bateau matossé au maximum et ballast rempli. C’est aux alentours de 10-11 nœuds que nous avalons ce bord qui se terminera juste après le coucher de soleil. Le vent a légèrement changé de direction sur la fin du bord, mes concurrents directs ont affalé leurs spis pour des voiles plus adaptées. Ce coup-ci je ne sens pas du tout la manœuvre et décide de garder le grand spi coute que coute. Ce sera bénéfique car le temps qu’ils ont perdu dans leur changement de voile n’a pas été comblé par le gain en vitesse avant d’arriver à Groix que nous contournerons au près et donc avec seulement le foc et la grand voile. Je suis bord à bord avec un autre bateau et nous cherchons ensemble tant bien que mal les trois bouées que nous devons passer, elles ne sont pas éclairées et il faut pas mal de chance pour les passer du bon coté et sans les heurter ! Passé Groix nous partons plein sud vers le plateau des Birvideaux près de Quiberon et Belle Ile, le bord se fera sous code 5, une sorte de petit spi qui permet de naviguer presque travers au vent. Une fois envoyé, je réalise là encore qu’il y a un vrai déficit avec cette voile que j’ai acquise aussi à faible coût pour pouvoir commencer à naviguer et les voiles de mes concurrents leur permettent d’être franchement plus rapides. Cependant le problème va être vite réglé car l’embase qui tient le bout dehors (grand tube en carbone qui permet de mettre les grandes voiles d’avant comme les spis et le gennaker) cède brusquement et part à l’eau emmenant avec lui le code 5… Oops ! Je me dépêche évidemment de tout ramasser (toujours sans pilote automatique ;-) ) et continue ma route à petite vitesse. La pièce cassée était une pièce temporaire que nous avions réalisé en attendant de faire une pièce beaucoup plus solide mais presque dix fois plus onéreuse…J’admets avoir un peu souri en réalisant que c’était cette pièce qui a cassé. J’étais certes triste de ne plus pouvoir continuer à me battre à cette belle place, mais soulagé que ce soit juste cette pièce. De toute manière je suis résolu à finir la course mais à partir de cet instant du récit je ne parlerai plus de classement car j’ai vu tous les bateaux me doubler à grande vitesse !

Après avoir enroulé les Birvideaux (haut fond rocheux entre Groix et Belle-Ile) nous partons pour un long bord remontant jusqu'à la pointe de la Bretagne, à l’extérieur de l’ile de Sein. Nous débutons ce bord de nuit et sous génois au ralenti. Pour gagner un petit peu de vitesse je décide de rajouter le tourmentin entre le foc et la grand voile, je gagne un peu mois d’un demi nœud, c’est déjà ça ! Au lever du jour je me décide à tenter une réparation et après deux heures de bricolage avec les moyens du bord (pas grand chose !) je finis par établir solidement le tangon en arrivant à hauteur de Penmarc’h. Afin de tester gentiment la réparation j’envoie le spi lourd qui à une petite surface - cela me permet au passage de voir à quoi il ressemble car je ne l’ai encore jamais utilisé la réparation – puis la réparation contrôlée, j’envoie le grand spi qui va me permettre de me rapprocher assez rapidement de mon but. Jusqu'à une dizaine de miles où le vent tombe complètement et je me retrouve face au courant. En général dans cette situation on met l’ancre afin de stopper le recul, mais il y avait ici plus de 70 mètres de profondeur et je n’avais pas assez de longueur pour ancrer… je reste donc concentré pour limiter les dégâts et prends mon mal en patience. 

Après une bonne heure le vent revient et ma progression reprend.  Malheureusement les concurrents qui étaient encore derrière moi ont touché le vent avant moi et arrivent à me doubler… en évitant ma position toujours sans vent. Les premiers bateaux de « série » (le mien est dans la catégorie des « prototypes »)  sont passés eux aussi, assez frustrant…

Fatigué mais heureux !

Une fois la pointe de Bretagne passée c’est de nuit et au près dans un vent très faible, voire absent, que nous rentrons très doucement dans le baie de Douarnenez. Par bonheur nous sommes, en passant, spectateurs d’une lune qui illumine le ciel et les alentours au point que l’on voit les quelques cumulus et bateaux autour de nous comme s’il faisait jour mais en noir et blanc, une image marquante. Les quelques derniers miles auront été très durs avec une bataille de virements de bord au pied des falaises pour éviter le courant. Chaque manœuvre étant un exploit dans lequel il faut puiser au plus profond l’énergie restante après 40 heures sans fermer l’œil. Nous passons finalement la ligne d’arrivée vers 6 heures du matin et … 6 heures après le premier prototype.


Le résultat n’est clairement pas à la hauteur de mes espérances, mais j’ai appris plein de choses, découvert le bateau en conditions, réussi à prouver que je pouvais jouer la gagne, le bilan est donc tout de même positif pour moi.


A peine sur le ponton je monte dans mon camion pour m’endormir quasi instantanément (après vous avoir envoyé la petite vidéo) ! La tête pleine de plaisirs et belles images. Et l’énorme envie d’y retourner !

Prochain rendez-vous la semaine prochaine avec le Mini-Fastnet au départ de Douarnenez à nouveau !

Merci à vous tous et spécialement à ma chérie qui m'a accompagné et supporté tout au long du weekend !

Lien vers le site internet de l'hotel Ty Mad : http://www.hoteltymad.com/ 

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